Jeanne Blanconnier a 26 ans, elle est responsable des Archives municipales de Couëron
A 23 ans, Sonia Rousseau est archiviste et généalogiste familiale
Voici leurs parcours
Jeanne Blanconnier
La voie des archives, retour sur un parcours universitaire :
En sortant de mes études secondaires, je souhaitais devenir journaliste. Je me suis donc orientée vers la faculté d’histoire de Nantes afin d’avoir une première base solide de connaissances historiques (et parce que j’étais passionnée). Au terme de ma deuxième année de licence, je me suis finalement aperçue que le domaine patrimonial/historique me plaisait énormément. Je me suis renseignée sur les différents métiers culturels spécialisés dans l’histoire : la valorisation patrimoniale et l’archivistique étaient mes favoris. J’avais découvert le domaine des archives à plusieurs reprises au cours de mes études et je trouvais ça passionnant. J’ai donc décidé de m’orienter vers ce domaine pour plusieurs raisons : – L’attrait pour le patrimoine écrit – L’idée d’œuvrer à l’histoire future (on le dit tellement que cela semble un peu cliché désormais, mais c’est véridique) – La multitude de postes variés qui existent. Dans le grand ouest, seule l’université d’Angers proposait une formation en archivistique, j’ai donc décidé de postuler. A l’époque, je n’avais pas conscience que c’était un master sélectif et qu’il n’était pas facile d’y obtenir une place, j’avais donc postulé uniquement à cet endroit… J’ai eu la chance d’être sélectionnée et j’y ai effectué mes deux années de master.
Débuts dans le monde professionnel et premier poste :
Le premier poste et la recherche d’emploi : mon tout premier poste fut aux Archives départementales de Vendée. J’ai obtenu un poste d’assistante archiviste à l’été 2018, entre la fin de ma licence d’histoire et le début de mon master en archivistique. J’ai obtenu ce poste après plusieurs demandes : j’ai d’abord demandé un stage pour découvrir le métier et m’assurer que cela me plaisait et j’ai ensuite postulé pour obtenir un poste estival en salle de lecture. Le stage a été validé mais ma candidature pour l’été a été refusée. Après mon stage, les AD85 m’ont finalement recontactée pour me proposer un remplacement en tant qu’assistante archiviste : j’ai effectué la rétroconversion d’un catalogue de bibliothèque d’un fonds privé très prestigieux pour les Archives. J’étais ravie car cela m’intéressait davantage que la salle de lecture. L’entrée sur le marché du travail : mon entrée dans le monde des archives s’est très bien passée. J’ai eu beaucoup de chance car mes contrats se sont enchaînés, je n’ai eu aucune période de creux. Les ressentis sur les débuts de vie pro : Je me suis vite aperçue qu’il n’était pas facile de trouver du travail dans ce domaine, non par expérience, mais par ce que m’expliquaient mes collègues : pour changer de poste, il fallait parfois être prêt à quitter son département. J’ai aussi rapidement réalisé que les postes en archives anciennes et contemporaines étaient peu courants et qu’il y avait de fortes probabilités que je travaille plutôt en tant que records manager. Dans un premier temps, cela ne m’a pas vraiment enchanté car c’était surtout les anciennes archives qui m’intéressaient… Finalement, je trouve ça très riche comme expérience. J’ai également compris qu’il fallait passer les concours au plus vite, pour éviter la précarité qui est très présente dans ce domaine et d’autant plus hors-Paris : les vacataires peuvent avoir 2-3 mois de mission par-ci, puis par-là, sans jamais obtenir de longs contrats. Par ma grande surprise et malgré le fait que nous soyons souvent seuls sur nos postes et dans nos organisations, nous bénéficions d’un grand réseau d’archivistes (AEDAA, AAF, les réseaux inter-collectivités). Ce monde est petit et, au fur et à mesure des expériences, nous connaissons davantage de ceux qui le font exister. C’est très agréable de savoir que vous pouvez toujours compter sur quelqu’un qui saura vous aiguiller en cas de problème. J’ai la chance, dans mon poste actuel, de travailler avec Nantes Métropole qui a lancé un réseau relatif aux archives dans la métropole. Cela me permet de rencontrer les archivistes ou les référents archives des autres collectivités et d’avoir un appui, un relai, un soutien en cas de problème.
Des changements de poste :
Assistante archiviste aux Archives départementales de Vendée – juin-août 2018 (job étudiant) : Difficultés rencontrées face au langage et méthodes archivistiques car je n’avais pas commencé mes études. Assistante archiviste aux Archives départementales de Vendée – juin à août 2019 (job étudiant) : Travail très répétitif car transcriptions de fiches constituant une base de données sur l’histoire religieuse de Vendée et numérisation d’une collection de titres de presse ancienne. Archiviste stagiaire au pôle conservation, Centre des Archives diplomatiques de Nantes (CADN), Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères – mars à juin 2020 (contexte de confinement dû au 1er covid : stage à distance) : Initialement, je devais classer un fonds d’archives du Protectorat marocain, corriger le répertoire méthodique qui avait été réalisé précédemment et réaliser un dossier pédagogique mais ces missions n’étaient pas réalisables à distance, d’autant que le ministère n’a pas encore de portail numérique. J’ai donc dû adapter mes missions. Cela m’a fait réaliser l’importance d’avoir des portails numériques à destination des publics. Ce stage a également montré que le métier d’archiviste nécessitait une présente sur site : difficile de classer ses archives en étant chez soi …. Archiviste vacataire au pôle conservation – remplacement d’un titulaire, Centre des Archives diplomatiques de Nantes (CADN), Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères – juillet 2020 à août 2021 : Travail très enrichissant sur les fonds des protectorats marocain et tunisien. J’ai rencontré des difficultés face aux méthodes de traitement et de classement, qui sont spécifiques au Ministère, et aux types de documents traités (documents diplomatiques, courriers classés secret défense, etc.). Le travail était assez répétitif car le CADN est composé d’une trentaine d’agents et chaque pôle possède sa propre mission : pôle valorisation, pôle collecte et pôle conservation. J’ai quitté le ministère car les opportunités sans concours y étaient précaires : des contrats de quelques mois, renouvelés deux ou trois fois par an. Pour obtenir un CDI, il faut être titulaire et le MEAE possède son propre concours. Les archivistes qui y travaillent ont, pour la majorité, obtenu les concours du MEAE et non ceux de la Culture. Je ne souhaitais pas passer les concours du ministère, d’autant qu’il y a un risque d’être mutée à La Courneuve, le deuxième centre d’archives du ministère. J’aurais pu continuer en tant que vacataire mais le contrat qu’on me proposait à partir de septembre 2021 ne durait que quelques mois et j’ai été recrutée en parallèle. Responsable des Archives municipales de Couëron, service Système de l’information, Ville de Couëron – depuis septembre 2021 : J’ai été recruté comme contractuel pour une durée de trois ans mais je passais en même temps le concours d’assistant de conservation (obtenu en novembre 2021). J’ai été mise en stage en janvier 2022 et titularisée en janvier 2023. Je suis seule à gérer les services producteurs, les archives de la ville, ainsi que la communication et les projets transversaux : SAE avec la métropole ou encore la migration des dossiers numériques de la collectivité vers Teams. Ce poste me faisait très peur au début car je n’avais jamais travaillé en commune, ni avec des archives communales principalement contemporaines. Il fallait que je me mette à niveau très rapidement. Les services étaient demandeurs car ils n’avaient pas bénéficier de politique de collecte depuis quelque temps, donc j’ai également dû répondre très vite à leur demande. Il est parfois compliqué, au vu de mon jeune âge, de me sentir légitime face aux agents qui sont dans la collectivité depuis des dizaines d’années. J’observe que de nombreux agents sont frileux face à la gestion de leurs archives malgré les formations et les accompagnements. Beaucoup voient les archives à travers les clichés. Aussi, et malgré la volonté de mener une politique d’archivage, les archives manquent de considération.
Et dans 5 ans ?
Je suis actuellement assistante de conservation mais je souhaiterais obtenir le concours d’attaché de conservation en 2025. Le poste que j’occupe actuellement est très enrichissant, m’offre énormément d’autonomie et me permet une grande montée en compétence sur des thématiques diverses. C’est mon premier poste à responsabilité et je pense qu’il est important que j’en apprenne encore. Maintenant que je gère énormément de missions, je ne souhaite pas me diriger vers un poste qui ne m’offrira pas autant de perspectives. Moi qui ne souhaitais pas travailler dans les archives contemporaines, je trouve finalement que c’est un domaine vaste et très enrichissant : sensibilisation des services producteurs, création d’outils de gestion, gestion courante, animation de réseau, archivage électronique, etc. Néanmoins, je ne suis pas certaine de vouloir continuer à travailler seule, en tant qu’archiviste (c’est malheureusement le problème de ce métier : dans beaucoup d’organisations et de collectivités, l’archiviste est seul à gérer ce domaine). A terme, j’aimerais énormément intégrer un service d’archives départementales et me spécialiser dans la valorisation et les archives privées, qui sont les deux domaines archivistiques qui m’ont de suite énormément plu. Je ne sais pas où je serai dans 5 ans. Je pense que je me serai dirigée vers un autre poste mais je ne sais vraiment pas vers quel type. Tout dépendra de l’obtention des concours, des circonstances et des opportunités que peuvent offrir ce métier (et la vie !).
Question bonus 🙂 L’AEDAA et vous :
Je ne me suis jamais investie dans l’AEDAA mais certains de mes camarades l’ont fait. Je trouve que c’est une très bonne initiative et qu’il est important d’avoir des relais autres que l’Université afin de garder contacts entre étudiants, de valoriser les parcours, les réalisations et le métier en général. J’ai l’impression que l’AEDAA évolue énormément ces derniers temps et je suis davantage intéressée par ce que l’association propose : les articles sur des thématiques particulières, la galerie de portraits, la présentation des mémoires et des stages en cours.
Je vous remercie de l’intérêt que vous portez à mon profil et espère que cela donnera envie à plein d’autres étudiants de se diriger vers le métier ! Il est important de débunker les idées reçues sur ce domaine. J’essaye, autant que possible, d’expliquer autour de moi ce qu’est le métier, en quoi il est important, et j’ai souvent des retours très positifs ! Archiviste, c’est un métier en devenir et je le pense sincèrement. Beaucoup d’organisations réalisent que c’est nécessaire d’avoir une bonne gestion de leurs informations. Dans un monde de création constante d’informations, c’est important d’avoir quelqu’un qui en maîtrise le cycle. D’ailleurs, la collectivité où je travaille a bien compris qu’il fallait concevoir les archives d’une façon plus large qu’une simple gestion de documents papiers : en intégrant la mission archives dans le service système d’information et en rattachant le responsable gestion de l’information (qui est aussi délégué à la protection des données) et la responsable des AM, il est possible de structurer, de manière globale et macro, l’ensemble des processus informationnels.
Sonia Rousseau
La voie des archives, retour sur un parcours universitaire :
J’ai réalisé deux licences : une Licence d’histoire à l’Université d’Angers et une Licence professionnelle Métiers de l’information : archives, médiation et patrimoine, à l’Université d’Angers. J’ai choisi la voie des archives puisque je ne savais pas où m’orienter après ma licence d’histoire, mais aussi parce que j’ai une réelle passion pour le rangement et le classement, la recherche de documents anciens et aussi pour répondre à certains besoins.
Débuts dans le monde professionnel et premier poste :
Durant la licence professionnelle, j’étais en contrat de professionnalisation à l’ADEME en tant qu’archiviste. Ensuite, j’ai obtenu un poste de gestionnaire en base de données chez Savoirs Plus. Pour ma première recherche d’emploi, j’ai utilisé les sites d’emploi comme Pôle Emploi ou Indeed. Mon entrée sur le marché du travail a été difficile puisque je voulais rester dans le Maine-et-Loire et qu’il y avait peu de propositions d’emploi, et on était nombreux sur chaque poste à postuler. Pour mes débuts de la vie professionnelle dans le monde des archives, je l’ai trouvé à la fois compliqué mais assez fluide. Il est compliqué de se retrouver seule face aux fonds que l’on rencontre et de s’affirmer, mais une fois qu’on a ses marques, et que l’on suit ce que l’on a appris, tout se déroule bien.
Des changements de poste :
Archiviste – ADEME – Alternance durant 1 an Gestionnaire de bases de données – Savoirs Plus – 5 mois Archiviste – Musée du Génie – 3 mois Archiviste – DGA (direction générale de l’armement) – 2 mois Archiviste – Communauté de Communes Loire Aubance – 1 mois Assistante administrative – IGC – 2 mois Généalogiste familial – depuis septembre 2021 et encore en poste (autoentrepreneur) La plupart du temps, mes postes étaient en CDD.
Travailler dans le privé :
Le fait de travailler dans le privé est plutôt une opportunité.
Et dans 5 ans ?
Très bonne question, j’avoue ne pas savoir. Peut-être en poste d’archiviste dans une entreprise, ou alors à mon compte à 100%.
Question bonus 🙂 L’AEDAA et vous :
L’AEDAA me permet de suivre l’actualité des archives sans que cela soit trop éparpillé.
Un grand merci à Jeanne et Sonia pour leur participation, nous espérons que ces portraits ont suscité des vocations !